Dans la salle d'étude

Le matin de son premier jour de cours avec son tuteur était arrivé. Aline l'avait levée très tôt pour bien la préparer et lui donner un déjeuner consistant. Mais Mary n'avait pratiquement rien mangé. Elle avait eu une petite heure de promenade avec sa gouvernante où elle lui avait expliqué pourquoi il fallait beaucoup travailler et être la meilleure. La petite fille avait écouté et acquiéscé. D'un coup, la gouvernante lui dit de marcher plus vite. Ce qu'elle fit. Sur le chemin de la villa, toutes les hypothèses vinrent à la tête de Mary. Une attaque de djinns déchainés ? Un magicien fou furieux ? Non, ce n'était qu'un passant. Aline lui murmura
'tu sais qui c'est ?'. Mary ne dit rien. La gouvernante reprit 'C'est Erzekiel Mortdame. Un magicien très puissant. On raconte qu'il a une dizaine de marids enfermés dans sa cave et qu'il y jette des gnomes innocents pour s'amuser. Ne va jamais lui souffler dans les bronches !'
Le passant avait disparu quand elles arrivèrent dans le hall de la maison. Aline poussa un petit cri. 'Ta leçon ! Vite, suis moi !' Elles arrivèrent dans la salle d'étude, vaste et claire. Il y avait un grand bureau et à coté, un autre plus petit. Les murs étaient tapissés de livres et d'objets étranges. Son tuteur était assis dans un fauteuil, près de la fenêtre. Il lisait. Aline fit signe à Mary d'aller s'asseoir à son petit bureau. Mr BB leva la tête.

Mary déglutit. Son tuteur ne lui donnerait pas sa leçon aujourd'hui. Il avait trop de travail. Elle était bonne pour passer une journée suplémentaire en compagnie d'Aline qui, certes, était gentille mais qui ne connaissait rien à la magie. Elle s'enferma dans sa chambre pour étudier. Son tuteur ne la guidait pas, qu'à cela ne tienne, elle apprendrait toute seule. Mary attrapa le premier ouvrage de sa bibliothèque. Un traité sur les différentes classes de démons. Pas très exaustif, mais c'était déjà ça. Quand elle descendit pour le souper dans la cuisine avec sa gouvernante, elle avait les yeux rouges et la main douloureuse d'avoir trop dessiné.

Quelques mois sont passés. Mary s'est agguérie et manipule avec aisance l'invocaton des djinns du 5° degré. Sa prudence et sa précision, autant en dessin qu'en diction la rassurent petit à petit. Ce soir même, elle allait invoquer un afrit. Son tuteur était en réunion et sa gouvernante prennait son congé. Elle savait pertinement qu'elle n'avait que peu de chances de réussir. Mais avec Mormel, elle pourrait rejoindre les rangs de la résistance et marquer, petit à petit, quelques points sur les magiciens. Jusqu'à gagner la partie. Elle avait vétu une tenue de chez Pinn's que sont tuteur lui avait fait parvenir pour la féliciter de son invocation de gnomoncule. Enfin. Elle était simple, noire et la petite fille se sentait comme une vraie magicienne, celles qui sont poursuivies par les paysans dans les contes de fées. Il ne lui manquait que le chapeau. Ses bras maigres s'enroulèrent autour du manuel et elle courut, telle un spectre les couloirs de la résidence. La salle d'invocation n'était éclairée que par un rayon de lune et elle eu du mal à briser l'enchantement qui y régnait en allumant la lumière. Elle baissa le chauffage car elle étouffait dans son petit corset et ouvrit une fenêtre. L'air frais lui raviva les sens.
Dans un silence mortel, elle tira une craie d'un tiroir et traça d'un geste sur et léger le pentacle. Les clauses protectrices s'enroulaient tels des serpents et elle sentit comme un léger vertige puis s'évanouit. Ce fût la craie qui, en tombant de sa main ouverte la ramena à la vie. Il faisait froid dans la pièce à présent et une sueur gelée coulait entre ses omoplates. Elle se releva, vérifia le tracé des pentacles et parla. L'invocation lui sembla éternelle tant elle avait la bouche sèche. Elle sentait son énergie couler dans le pentacle voisin, l'encercler et créer la porte vers l'autre lieu.

Oh non... ça y est, on m'invoque. Je croyais avoir fait une marque dans les annales des attaques maléfiques et mon nom était censé ne plus jamais être prononcé depuis ma séance d'invocation avec Rablest. Bon, courage. Mes yeux de dragon s'ouvrent sur... J'ai du me tromper de pentacle. Il y a un djinn pervers qui se déguise en petite fille. Un rapide regard vers les niveaux supérieurs m'indiquent clairement que cette gamine déguisée en sac poubelle est humaine. D'une voix caverneuse et rouillée par le manque d'habitude, je lui demande ce qu'elle veut. Et j'attends.

L'immense dragon tient avec peine dans son pentacle.
"Que veux tu ?"
Elle ne le savait pas assez. Elle voulait renverser les magiciens. Elle était une magicienne. Elle voulait aider les plébéiens. Elle était une magicienne. Quelqu'un, un adulte, un magicien devait l'aider. Mais qui ? Une discussion avec son tuteur lui revint en mémoire.
"Les tchèques, les praguois surtout, nous tiennent en piètre estime : ils nous haïssent plutôt. Le septre de Gladstone, un puissant artefact renfermant des entités plus puissantes que des marids, leur a ravi leur roi et leur honneur. C'est chez eux que les plébéiens révoltés courent. Je pense que le ministre de la police, Gliin Rablest est avec eux, mais rien n'est moins sur."
Elle se rengorgea en constatant son pouvoir. Il y avait un afrit en face d'elle, à son service.
- Protège moi en tout temps, lieu, situation, soit plus invisible que le vent et discret que l'hashishin. Plus silencieux qu'un lion aux ageuts. Obéi, à chacun de mes prochains commandements, comme t'entrave le pentacle d'Alebrand. Sous les premiers niveaux, présente toi comme une gerbille et reste dans ma poche, sauf si je t'ordonne de bouger ou si ton premier ordre entre en vigueur. Enfin, sache que tu es à ma merci, et que chacune de tes erreur sera durement chatiée.
Elle récita l'incantation et sortit de son pentacle, une gerbille sauta dans sa poche. Elle devait se rendre chez Rablest et lui parler, lui montrer son pouvoir.
Au pas de la porte, elle murmura :
Fran Rogy... Te voilà hors la loi.